Robert Spence
Université de la Sarre, Allemagne
Sur quelques problèmes liés à la co-présence de multiples genres dans l'histoire du déluge
Pour la Modernité, les disjonctions séparant les discours de la beauté, de la vérité, et de la justice sont sacrées : si un auteur quelconque essaie de les rompre, il rendra son discours absurde... même s'il ne se veut pas parodique.
Les Anciens, au contraire, ne s'étant pas soumis à ce système de disjonctions, pouvaient très bien combiner la poursuite de buts esthétiques, scientifiques, et juridiques dans un seul et même texte ; au cours de cette communication nous espérons pouvoir démontrer quelles en sont les conséquences pour la lecture de l'histoire du déluge.
La co-présence d'un genre mythique ( « Alors Dieu dit à Noé : La fin de toute chair est arrêtée par devers moi (...) » ) et d'un genre historique ( « L'an six cent de la vie de Noé, le second mois, le dix-septième jour du mois, en ce jour-là toutes les sources du grand abîme jaillirent (...) » ) n'est, c'est notre conviction, qu'un prétexte littéraire -- prétexte qui est, au-delà, lui-même porteur d'un troisième genre, dont le champs discursif semble être le problème de l'irrationalité de certaines constantes de l'astronomie et de la mathématique.
La présence de ce troisième genre permet de réinterpréter quelques passages difficiles (sur le plan syntaxique et lexical) et même contradictoires (sur le plan de la cohérence textuelle) qui font partie des instructions pour la construction et l'utilisation de l'arche, en même temps qu'elle nous invite à franchir les bornes de notre conception traditionnelle de la sémogénèse et ses possibilités.